Le nouveau secrétaire d’Etat à la Citoyenneté et à la lutte contre les discriminations défend un « universalisme républicain » contre le « repli identitaire».
Les faits -
Proche du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, Othman Nasrou a apporté jeudi son soutien au maire socialiste de Montpellier, Michaël Delafosse, victime de tracts malveillants et accusé d’islamophobie par des militants proches de La France insoumise pour avoir défendu la laïcité
A peine évoquée, la nomination d’Othman Nasrou au secrétariat d’Etat à la Citoyenneté et à la Lutte contre les discriminations a fait bondir la gauche et tiquer en macronie. Et pas seulement parce que cet habitué des plateaux télé y a souvent eu la dent dure à leur égard. Proche du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, dont il partage la ligne libérale et conservatrice, il s’est surtout distingué ces dernières années par un discours musclé contre le « communautarisme », l’islamisme et le « wokisme », pointant un « péril identitaire ». Elu d’opposition (Les Républicains) à Trappes (Yvelines), il n’a cessé d’y dénoncer la progression du communautarisme religieux à l’ombre du clientélisme. En 2023, il mettait même en garde contre un phénomène de « désassimilation » à l’oeuvre selon lui dans le pays: « sous couvert d’antiracisme et de droit à la différence, nous avons laissé déconstruire l’idée que la France avait une identité dont on pouvait être fier », s’alarmait-il dans Le Figaro.
Ce combat, il entend manifestement le mener désormais au sein du gouvernement de Michel Barnier, avec la bénédiction de son ministre de tutelle. Installé dans son nouveau bureau de la place Beauvau, Othman Nasrou persiste et signe: la désassimilation, « c’est une réalité. Est-ce qu’on a aujourd’hui un sujet de cohésion ? Oui. Est-ce qu’il y a un système de valeurs parallèle qui vient heurter ce qui est marqué au fronton de nos édifices publics ? Oui ». Et de citer le cas du maire socialiste de Montpellier, Michaël Delafosse, victime de tracts malveillants et accusé d’islamophobie par des militants proches de La France insoumise pour avoir défendu la laïcité. A la suite de nos révélations sur la campagne diffamatoire dont il fait l’objet, Othman Nasrou lui a apporté jeudi son soutien « plein et entier » sur X.
Ce franco-marocain de 37 ans, né à Casablanca et naturalisé en 2012, en est convaincu: « la France n’est pas un pays raciste ». « Je ne dis pas que le racisme et l’homophobie n’existent pas. Mais ils sont l’apanage d’une infime minorité », estimait-il sur X en 2013. Au risque d’apparaître à contre-emploi dans ses nouvelles fonctions ? « Les victimes de discriminations me trouveront toujours à leurs côtés », rétorque-t-il, « meurtri » par les accusations d’homophobie qui ont accompagné sa nomination. En cause: un tweet daté de 2015 dans lequel il apportait son soutien à la proposition de Valérie Pécresse d’abroger la loi sur le mariage pour tous.
Repli identitaire « Nul ne doit être agressé, inquiété, insulté, ostracisé, entravé en raison de son origine, de sa couleur de peau, de sa religion ou de son orientation sexuelle. Nous serons totalement intraitables », assure-t-il. « Mais pas en flattant le repli identitaire, ajoute-t-il aussitôt. Je serai le secrétaire d’Etat de l’universalisme républicain, contre l’assignation à résidence identitaire ».
"Je suis totalement solidaire de ce que fait et dit Bruno Retailleau"
Alors qu’il fait encore ses premiers pas dans ses fonctions, l’homme se donne pour mission d’oeuvrer en faveur de « l’égalité des droits » et « des chances », de conforter cette « promesse républicaine » dont lui-même a bénéficié, celle d’un « pays qui fait de quelqu’un né à l’étranger un membre de son gouvernement ». Mais elle a un « corollaire » à ses yeux: « une très forte exigence en matière de devoirs ». D’ailleurs, ce sera son premier chantier, annonce-t-il : « la bataille pour l‘intégration », qui doit être « plus exigeante ». Othman Nasrou prévoit pour cela de se pencher sur les procédures existantes, visant à faciliter l’intégration des étrangers primo-arrivants, demandeurs d’asile ou bénéficiaires du regroupement familial. Avec une « intuition » déjà : « il va falloir renforcer tout cela et être beaucoup plus exigeant ».
Un discours en phase, donc, avec la volonté de son ministre de tutelle de durcir la politique migratoire. Bruno Retailleau peut d’autant plus compter sur le soutien actif de son secrétaire d’Etat qu’il a fortement oeuvré pour la nomination à ses côtés de celui qui a été son directeur de campagne lors du match qui l’a opposé à Eric Ciotti pour la présidence des Républicains en 2022. Habile apparatchik, Othman Nasrou a connu une ascension politique météoritique depuis qu’il a été repéré par Valérie Pécresse il y a douze ans, alors qu’il était encore étudiant à HEC. La nomination au gouvernement l’a pris par surprise, comme le reste de sa famille politique. Mais il compte bien faire le job. Alors, quand son ministre est critiqué pour avoir estimé que l’immigration n'était « pas une chance », il balaie d’un revers de main « un mauvais procès». « Je suis totalement solidaire de ce que fait et dit Bruno Retailleau », ajoute-t-il. Au cas où on en douterait encore.
Article à retrouver sur le site de l'Opinion : https://www.lopinion.fr/politique/immigration-othman-nasrou-veut-mener-la-bataille-pour-lintegration
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