Le premier secrétaire général délégué des Républicains appelle à ne pas « faire porter aux accords commerciaux la responsabilité de nos propres errements ».
Face à la colère des agriculteurs, Les Républicains se sont déclarés hostiles à la signature d’un accord commercial entre l’UE et le Mercorsur. En visite lundi à Berlin, le Premier ministre, Gabriel Attal, a réaffirmé le refus de la France, malgré le soutien de l’Allemagne à cet accord.
Proche de Bruno Retailleau, Othman Nasrou est aussi vice-président de la région Ile-de-France. Il appelle à ne pas remettre en cause le principe même des accords de libre-échange : « Les autres chemins ne mènent qu’à notre appauvrissement collectif ».
Emmanuel Macron s’oppose à la signature du traité de libre-échange négocié par l’Union européenne avec le Mercosur. A-t-il raison ?
Chacun de nos accords commerciaux potentiels doit être regardé à l’aune de nos intérêts. La viande bovine sud-américaine a une empreinte carbone trois fois supérieure à celle produite en France. Cet accord serait la définition même de la concurrence déloyale que dénoncent à juste titre nos agriculteurs. Contrairement à ce qu’on entend en ce moment, il ne faut pas remettre en cause le principe des accords commerciaux, qui peuvent être utiles quand ils sont bien négociés. Mais ce n’est pas le cas avec le Mercosur. Par ailleurs, ces quinze dernières années, la balance commerciale agroalimentaire de l’UE a gagné 60 milliards d’euros d’excédents supplémentaires. Dans le même temps, celle de la France s’est effondrée. Faire porter aux seuls accords commerciaux la responsabilité de nos propres errements est une facilité qui pourrait en réalité coûter encore plus cher à nos agriculteurs.
Faut-il une exception agricole française ?
Notre agriculture doit à la fois assurer notre souveraineté alimentaire, mais aussi être exportatrice comme elle l’était jusque-là. De très nombreuses filières dépendent des exportations, comme la filière viticole, celle des spiritueux ou encore les filières laitière et porcine. Les traités nous ont aussi permis de protéger les AOC (appellations d’origine contrôlée) et les IGP (indications géographiques protégées). C’est un atout de compétitivité important : sans cela, rien ne nous garantira que, demain, nous ne verrons pas arriver dans certains pays du « brie de Meaux » produit à l’étranger. Si notre agriculture souffre, c’est d’abord à cause du Green Deal, de la décroissance agricole et des normes plus contraignantes qu’ailleurs. Et ce ne sont pas les accords commerciaux qui ont imposé ces normes : nous avons mis des boulets aux pieds de nos producteurs. Le vrai sujet est là.
Quand le déficit commercial français tutoie les 100 milliards d’euros en 2023, le problème n’est-il pas surtout celui de la compétitivité de notre économie ?
Evidemment. C’est le meilleur indicateur de la situation réelle de notre pays et le révélateur du vrai bilan de la politique économique d’Emmanuel Macron. Quand on importe davantage qu’on exporte, on s’appauvrit. Il faut que la France redevienne une grande puissance exportatrice. Nous devons jouer le jeu des échanges internationaux, mais sans naïveté. Les autres chemins ne mènent qu’à notre appauvrissement collectif. C’est la mission de la droite de porter ce message.
Quelles solutions faut-il apporter ?
Il faut arrêter de surtransposer, déjà. S’il était vraiment courageux, Gabriel Attal ne se contenterait pas d’évoquer une « pause » sur les normes. Il faut annuler immédiatement toutes les surtranspositions et toutes les normes excessives. Il est anormal que certaines molécules soient utilisées dans d’autres pays européens quand elles sont interdites en France. Il était déjà absurde de ne pas appliquer la dérogation sur les néonicotinoïdes quand elle a été mise en œuvre ailleurs en Europe. Qu’on arrête de vouloir être toujours les mieux-disants, au détriment de nos producteurs. Parce qu’on finit de toute façon par importer, des produits qui, eux, sont moins-disants. En refusant de produire ici, nous nous condamnons à importer d’ailleurs. C’est non seulement une faute économique, mais aussi écologique.
Quel message doit défendre la droite dans cette campagne européenne ?
Celui de la défense des intérêts français en Europe. Nous avons la chance d’avoir un excellent candidat, François-Xavier Bellamy, qui a un vrai bilan européen. Il y a défendu les intérêts français comme personne, quand les macronistes ont soutenu la décroissance agricole ou pris le parti des lobbys anti-nucléaire et quand le Rassemblement national était totalement absent du débat européen, physiquement comme en termes de résultats.
Xavier Bertrand a « l’intention » d’être candidat à la présidentielle en 2027, Laurent Wauquiez aussi. Faut-il une primaire pour départager les candidats LR ?
Très franchement, la question ne se pose pas aujourd’hui. Nous devons d’abord mettre à profit l’année 2024 comme il faut, c’est-à-dire en faisant campagne à 100 % pour les élections européennes, en réaffirmant et en clarifiant notre ligne politique, en renouvelant notre manière de la présenter. Notre dynamique pour 2027 ne pourra venir que d’un travail sérieux sur le fond et d’un esprit collectif sur la forme.
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