ENTRETIEN - L’élu francilien appelle à la cohérence de la droite sur les retraites.
Othman Nasrou est le nouveau premier secrétaire général délégué du parti LR.
LE FIGARO. - On a un peu de mal à comprendre le message de la droite sur les retraites. Cette réforme est-elle nécessaire?
Othman NASROU. -Cette réforme est évidemment nécessaire. À droite, nous en avons toujours défendu le principe. Pourquoi faudrait-il aujourd’hui faire volte-face? Avec l’allongement de l’espérance de vie et la diminution du nombre d’actifs par rapport au nombre de retraités, les choses sont claires: ne rien faire, c’est continuer à transférer le fardeau d’une dette toujours plus lourde aux générations futures. D’ailleurs, en ayant refusé pendant cinq ans de faire cette réforme, Emmanuel Macron porte une lourde responsabilité.
À droite, nous devons garder notre cohérence et tenir un discours de vérité et de sincérité: sans recul de l’âge légal de départ, nous irons inéluctablement vers la baisse des pensions, qui appauvrira les retraités, ou vers la hausse des cotisations, qui appauvrira les actifs. Au Sénat, avec Bruno Retailleau, c’est une réforme équilibrée et courageuse qui est votée tous les ans. Aux deux dernières élections présidentielles, François Fillon et Valérie Pécresse ont tous les deux défendu courageusement et clairement le recul de l’âge légal de départ à 65 ans. Comment pourrait-on s’opposer à 64 ans aujourd’hui?
Mais le symbole des 64 ans tomberait avec les revendications sur les carrières longues…
Une chose est claire pour moi: renoncer à l’équilibre budgétaire de la réforme, c’est lui faire perdre tout son intérêt, et c’est aussi se détourner de ce que devrait être la droite de gouvernement. Mais fixer un cadre général n’interdit pas de regarder des situations particulières. Il est logique de prendre en compte tous ceux qui ont commencé à travailler très tôt, souvent dans des métiers pénibles, et de leur apporter une attention particulière. C’est tout le sens des amendements déposés par le groupe LR. Je crois qu’Éric Ciotti a réussi à trouver le bon équilibre pour que le texte permette à la fois de dégager des marges de manœuvre financières tout en gommant les angles morts comme sur les carrières longues.
Faudrait-il aller plus loin?
Certainement. Nous devons en finir avec les régimes spéciaux. Je ne comprends pas que le gouvernement y renonce en se donnant quarante ans pour y arriver, c’est-à-dire jamais. Ceux qui réclament plus de justice devraient d’ailleurs s’indigner en premier lieu de ces régimes spéciaux.
Moi, je suis de droite, et je pense que nous avons besoin de cohérence sur le fond et de discipline collective sur la forme
Par ailleurs, je veux rappeler aussi que nous avons un déficit structurel caché des régimes de retraites des agents publics de 30 milliards d’euros dont le COR ne tient pas compte. Cette réforme ne réglera pas tout, loin de là. Enfin, on ne doit pas s’interdire l’introduction d’une part de capitalisation, qui ne doit pas être un sujet tabou.
Aurélien Pradié, numéro deux de LR, ne voterait pas le texte à ce stade…
Moi, je suis de droite, et je pense que nous avons besoin de cohérence sur le fond et de discipline collective sur la forme. Nous avons la chance d’avoir une diversité de sensibilités à droite, mais ce débat a eu lieu à l’occasion des élections internes au sein de LR il y a quelques semaines, comme au sein du groupe LR à l’Assemblée. Si nous voulons être audibles, nous devons reparler d’une seule voix.
Mais la voix du député Pradié est-elle si isolée à droite?
Dans ce qu’il propose, je ne vois pas de solution pour la droite. Renoncer au sérieux budgétaire, c’est scier la branche sur laquelle nous sommes assis, et c’est mentir sur l’état du pays. Il n’y a aucun intérêt à entrer dans une surenchère de dépenses face au RN et à l’extrême gauche, et je ne me suis pas engagé pour cela. D’ailleurs, en ayant fait croire aux Français que l’argent public pouvait couler à flots et tout régler, Emmanuel Macron a commis une faute impardonnable. C’est aussi pour cela que nous ne serons jamais dans une coalition avec lui: nous aurons demain à réparer tout ce qu’il a abîmé.
Éric Ciotti aura-t-il l’autorité suffisante pour piloter LR?
Éric Ciotti a remporté l’élection interne. Il a toute la légitimité pour présider notre famille politique. Sur la réforme des retraites, je soutiens sans réserve son approche. Il faut désormais que, collectivement, avec lui, nous reconstruisions la droite. Nous n’avons pas besoin de petites phrases mais d’un vrai travail sur les idées.
Source : Le Figaro
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